Pour Myrtille

Claire se réveille un matin dans une chambre, éblouie par la lumière du soleil, vêtue uniquement de ses draps. Tout lui est inconnu, mais elle se sent bien et en sécurité dans cette chambre. À sa droite se trouve un miroir. Elle essaie de se concentrer sur son reflet, qui lui est légèrement familier, comme pour farfouiller dans ses souvenirs. Son but était de se remémorer. Comment est-ce qu’elle a atterri ici ? Toujours dans son lit, et contemplant le miroir, le plafond et les murs qui l’entourent, comme à la recherche d’indices sur lesquels elle pourrait s’accrocher pour retrouver sa mémoire, elle est interrompue dans un sursaut, par un faible toquement à la porte de cette chambre.
– Claire ?
Elle ne savait pas pourquoi, mais elle en était persuadée, ce chuchotement féminin venait de prononcer son prénom.
– Oui ?
– Ça y est, tu es réveillée ?
Lui rétorqua la voix, toujours en parlant doucement.
– Euh, je crois ?
Dis-elle non sans laisser échapper une part d’hésitation dans sa voix.
– Ça va ?
Cette fois, la voix ne chuchotait plus. Elle était interloquée. Claire allait-elle bien ? La concernée elle-même n’en savait rien. Comment définir une telle chose alors que sa propre mémoire, ce qui la façonne en tant qu’individu, lui semblait alors si vide et incertaine ?
– Je crois que j’ai besoin d’un petit moment pour reprendre mes esprits.
– Ah ? Prends ton temps, je comprends.
– Attends, est-ce que tu peux me dire ce que tu sais de moi ?
– Eh bien, euh, c’est surprenant comme question. Je… je peux rentrer ?
– Attends un peu, j’ai pas de vêtements.
Claire entendit un petit soufflement de nez d’amusement de l’autre côté de la porte. Elle prit alors soin de s’enrouler précautionneusement avec ses draps, par pudeur dont elle ne savait pas vraiment tracer l’origine.
– Voilà, je suis couverte, tu peux entrer.
Se présentait alors devant elle ce qu’elle prit d’abord pour son reflet. À y voir plus clair, cette femme avait des cheveux bien plus longs que Claire.

Cette nouvelle présence lui dit
– Ah, je vois. Tu as dû être réinitialisée
Celle-ci s’interrompit en voyant le regard interloqué de son hôte.
– Oh… Je connais bien ce regard, et, oui, nous nous ressemblons effectivement beaucoup. Je suis Clarisse, et je pense que si tu as su reconnaître ton prénom, tu comprends en quoi nous sommes si semblables. On m’a dit de venir te voir, mais sans me donner plus de détails…
Elle finissait sa phrase sur un ton qui laissait entendre dans sa voix un certain regret face à la situation. Claire se sentie rassurée d’un côté, mais d’un coup très stressée. Elle n’en savait donc que si peu d’elle-même ? Elle se recroquevilla dans ses draps et demanda d’une voix pleine d’émotion
– Je… c’est… normal ?
Clarisse sentit de suite la panique dans la voix de son interlocutrice. Elle se permit de s’approcher d’elle pour l’étreindre, en l’enroulant dans ses draps au passage.
– Ça va aller, je vais t’aider, je suis là.
Puis elle lui fit un tendre baiser sur la tempe, qui résonna dans la tête de Claire, qui s’effondrait en larmes, doutant de tout, du peu qu’elle sait, de ce qu’elle vient d’entendre. Des questions la parcourait depuis son réveil, mais là, dans la chaleur des bras de Clarisse, elle se libéra de ses émotions, et ses larmes quittaient son corps comme si ses incertitudes passaient à l’état liquide.
– Merci Clarisse. Tu penses que tu peux m’expliquer tout ça ?
Dit-elle, sans bouger des bras de sa rassurante étreinte.
– Bien sûr ma sœur. Est-ce que tu veux que je commence par quelque chose en particulier ?
– Nous sommes sœurs ?
Dit Claire en fronçant les sourcils, bien que Clarisse ne le vit pas.
– On peut dire ça comme ça. Pas dans le sens biologique du terme, mais je te considèrerai toujours comme ma sœur. Et attention hein, j’espère que ce sera toujours réciproque ! Le ton enjoué de Clarisse était clairement là pour essayer d’alléger l’ambiance
– Je crois que… j’ai besoin de comprendre qu’est-ce que je suis.

Clarisse n’avait vraisemblablement pas réussi à détendre la discussion. Mais elle prenait la question de son homologue au sérieux.
– Tu es une automate.
– Ça veut dire que je ne suis pas vivante ?
– Si, bien sûr. Bien que c’est ce que nos détracteurs disent de nous, je suis convaincue que nous le sommes.
– Nous ?
– Ah, oui, euh, je pense que j’aurai pu commencer par là, excuse-moi. Bref, moi aussi je suis une automate. Tu trouves que je n’ai pas l’air vivante ?
Elle dit ces mots en portant son index et son majeur en V devant son visage tout en esquissant un grand sourire et en faisant un clin d’œil, ce qui fit pouffer de rire sa sœur dans une candeur qu’elle commençait à voir naître en elle-même. Clarisse savait qu’avec cette simple phrase, elle répondait bien mieux à la question quant à leur vitalité.
– Haha, si, bien sûr. Mais ça veut dire que quelqu’un nous a créé ?
Sa peur laissait progressivement place à une part certaine de curiosité.
– Oui, et notre objectif, ça va être de la retrouver.
À cet instant, Clarisse se leva. Elle continua en disant
– À ce sujet, tu peux pas faire ça si t’es à poil.
– Ah, euh, oui. Tu sais où sont mes vêtements ?
– On m’a dit qu’ils ont été rangés dans le placard de la chambre.
Clarisse pointa un meuble rustique derrière elle.
– Mais, pourquoi est-ce que je suis nue d’ailleurs ?
– Eh bien, à ce que m’a dit l’aubergiste, tu es tombée dans la rivière, et vu le froid qu’on a en ce moment, tes compères ont préféré te retirer tes vêtements trempés avant de t’emmitoufler dans du tissu bien sec et chaud pour te ramener ici. Clarisse resta debout pendant qu’elle repartait dans ces explications, et son corps penchait vers la porte de la chambre. Claire comprit et l’interrompit :
– On s’en parlera après, je vais m’habiller.
– Je t’en prie ! Prends ton temps. Je serais juste derrière la porte si tu as besoin.
– Ça marche, merci Clarisse ! Sur ces mots, Clarisse quitta la chambre, et Claire se leva.

En se levant, Claire eut l’occasion d’observer plus en détails son corps. Bien qu’elle ne fut pas spécialement surprise, elle s’arrêta un moment car elle venait de voir que l’intérieur de sa poitrine abritait un caisson, depuis lequel une vitre ronde au cadre doré laissait apparaitre un mécanisme horloger en mouvement. Ce mouvement était stable et précis. Des pièces faisaient un va-et-vient, d’autres étaient en rotation, et en se concentrant, on pouvait percevoir un très léger cliquetis, qui a accompagné Claire toute sa vie. Bien que ne connaissant pas spécialement la technique derrière tout cela, elle observa que tout était coordonné à la milliseconde et au millimètre. Dès qu’elle se leva, elle sentit le rythme de ce mécanisme augmenter. Elle en était persuadée, elle arrivait à se souvenir de cette sensation, aussi courante pour elle que ce que pourrait être cette habitude universelle de léger souffle provoqué par la respiration, alternant entre une sensation fraiche et chaude au travers des narines humaines. Néanmoins, et probablement était-ce lié à son manque de mémoire, elle n’en avait plus l’habitude.
Claire en était désormais certaine, Clarisse disait vrai. Sur cet élan de confiance, elle alla à son placard et trouva ses vêtements. Pendant qu’elle s’habillait, elle appela sa sœur
– Clarisse ?
– Je suis là !
Entendit-elle au travers de la porte
– Toi aussi tu as ce hublot sur ta poitrine ?
– Ah, oui, bien sûr. Bien que derrière la porte, Claire entendit le léger sourire de sa sœur, plein de tendresse. Clarisse reprit :
– Mais tu verras, il y a beaucoup de différences entre nos mécanismes. le tien est clairement plus sophistiqué que le mien. Alors en train de s’habiller, Claire ne savait pas vraiment comment réagir à cette information. Elle n’a pas senti d’animosité ou de jalousie dans la voix de son interlocutrice, mais elle ne put s’empêcher de sentir un brin de culpabilité face à cette information, bien qu’elle n’y était pour rien.

J’ai toujours été un peu dissipé dans mes apprentissage, essayant de toucher à toutes les manières de créer, des fois en même temps. Ce qui ne fut ni efficace, ni satisfaisant. Aujourd’hui, je me concentre sur 2 choses : le dessin, et l’écriture.

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