Jours
consécutifs

Thème de la semaine

Je vous propose cette semaine un écrit, parlant d’accident scientifique dans un monde d’urban fantasy. J’avoue que j’ai laissé la plume filer, je ne m’attendais pas à écrire autant pour une mini-histoire.

Je vous souhaite une bonne lecture.

Comme j’arrive plutôt bien à me servir de mon téléphone maintenant, il faut que je poste ça quelque part : j’ai l’impression que j’ai fini par me résigner à vivre en faisant 15cm de haut.

Je viens de cocher la date du jour dans mon agenda en prenant une mine de critérium à deux mains, proportionnellement semblable en longueur à une branche d’arbre pour un humain normal, bien que, certes, un peu plus fin. J’ai tellement pris l’habitude que c’est apparemment devenu un réflexe de me laver mes mains (pleines de carbone à cause de mon crayon de fortune) dans ce bouchon de bouteille qui me sert d’évier. J’ai eu un moment soudain où j’ai pris du recul sur ma situation, je me suis dit « wow, tu commences vraiment à te faire à cette vie ». C’est pour cela que je me suis dit qu’il fallait que j’écrive à ce sujet. Je suppose que c’est principalement pour vider mon sac… Bon, allez, ça me fera du bien.

Mon but n’a jamais été de finir dans cet état quand j’ai commencé à manipuler ces Euclidithes. La preuve en est : je suis désormais incapable de les bouger, vu qu’elles sont chacune au moins deux fois plus grandes que moi. Leur éclat n’en est que plus beau vu d’ici, et bien qu’il ne s’agisse que de pierres, quand je les vois, j’ai l’impression qu’il s’agit de quelqu’un qui me nargue. Quand je me rend compte de ça, je me demande si tout va bien dans ma tête, mais c’est sûr que dans mon état, ça serait compliqué de prendre rendez-vous avec un psy, chaque sortie de mon appartement est un véritable périple.

Ni famille, ni proches à appeler, je me maudis d’avoir toujours été socialement inapte. Certes, j’ai déjà réussi à me faire livrer des courses au pas de ma porte, et ce ne fut vraiment pas une mince affaire de réussir à rentrer le tout dans mon logis. Heureusement pour moi, ma porte d’entrée est plutôt facile à ouvrir, et y grimper n’était pas un problème, grâce à un meuble juste à côté qui fut plutôt pratique à escalader pour ma taille. Dans cette étagère, j’y ai d’ailleurs établi mes mini-quartiers. Mais une fois la porte ouverte, j’ai d’abord dû localiser le sac qui contenait la voiture télécommandée que j’ai acheté avec mes courses. Je ne peux d’ailleurs m’empêcher de penser à ce que mon préparateur de commande a dû se dire en voyant que son client n’avait acheté que des doses minimes de nourriture (principalement séchée), et, une voiture télécommandée. C’est assez particulier. J’ose espérer que des commandes sans cohérence apparente, elle ou il a dû en voir passer avant moi. Pour revenir à cette voiture, elle n’était pas vraiment dans un sac facile d’accès pour mes 3 pommes. J’ai dû plonger dedans, me débattre comme un beau diable pour réussir à sortir la voiture, que j’ai dû faire tomber du sac et pousser jusqu’à chez moi dans son carton, tout en maudissant le suremballage une fois de plus, cette fois pour des raisons que je n’aurai jamais pu soupçonner de ma vie, et enfin la libérer de ses serre-flex en calant cette boîte contre mon fer à souder, fièrement posé sur un petit socle, de telle sorte à ce que je puisse orienter le carton du côté desdits serre-flex, pour les faire fondre en un point, un par un, pour un total de 8. Ce fut long, fastidieux, et cela a demandé beaucoup, beaucoup, d’ajustements. L’étape suivante fut d’y insérer des piles. Heureusement, pour ouvrir les compartiments correspondants, aussi bien celui de la voiture que celui de sa télécommande, mes tournevis de précision sont suffisamment petits et légers pour que j’arrive à les manipuler correctement. C’est fou d’ailleurs, ce n’était pas la même vis pour la voiture que pour sa télécommande. Mais qu’ont-ils en tête bon sang ?

Voiture prête et testée, il ne me manquait plus qu’à remorquer les sacs jusque dans ma maison. D’ailleurs, que chaque catégorie de produit soit dans un sac différent a beaucoup facilité la tâche, sinon j’aurai bien eu peur que cette voiture ne puisse pas être utile ici. Je ne saurai dire combien de temps j’ai passé à organiser le tout, mais maintenant, ça y est, j’ai de la nourriture accessible, de quoi boire, et de quoi me déplacer chez moi. J’ai aussi pu commander des vêtements pour poupées, mais malheureusement, ils ne sont vraiment pas confortables, les bords vifs des coutures intérieures sont tellement grossiers que c’est inutilisable pour un véritable être humain miniature, en plus qu’ils n’étaient pas vraiment à ma taille (ni à mon goût), mais j’aurai su m’en contenter, si seulement j’avais trouvé un moyen de les rafistoler. J’ai de quoi bricoler, mais la plupart de mes outils me sont désormais inaccessibles, quand ils ne sont pas trop lourds, ils sont trop bien rangés sur mon mur d’atelier (et quand je les regarde, on revient à ce sentiment de se faire narguer, mais je ne m’attarderai pas plus dessus).

Jamais je n’aurai cru qu’une imprimante 3D m’aurait été aussi utile. Certes ce n’est pas très pratique de préparer une impression quand on peut difficilement taper sur un clavier, mais fort heureusement, mon téléphone est bien plus simple à utiliser, je n’ai besoin d’aucun effort physique pour que mon toucher soir reconnu sur la dalle tactile, et en quelques bricolages, j’arrive à me débrouiller pour contrôler mon ordinateur avec. En impression 3D, tous les problèmes de proportions que j’aurai avec des objets standards se retrouvent inexistants, puisque que je peux changer moi-même l’échelle du fichier 3D avant de l’imprimer. J’ai donc, entre autres, du mobilier à ma taille et un grappin miniature (mais j’ai pour le moment trop peur pour m’en servir), j’ai même pu imprimer une échelle et des échasses. Un gros inconvénient est que je n’ai que du filament orange fluo, et j’avoue que je commence à avoir un peu mal aux yeux de voir ça partout autour de moi.

Grâce à ce confort acquis, j’ai pu reprendre mes recherches sur les Euclidithes, et je sens que je progresse ! J’ai réussi à réduire des vêtements à mon échelle en utilisant leur pouvoir, même si un bon nombre d’entre eux sont soit trop rétrécis, soit pas assez, je pense que j’ai trouvé les bonnes fréquences, et de manière générale le bon protocole, pour réguler le taux de rétrécissement. Ça fait du bien de pouvoir se changer, après plus d’un mois à laver tout le temps le même ensemble jour après jour, pour les laisser sécher au dessus d’un radiateur nuit après nuit. Néanmoins, j’ai essayé de réduire un multimètre, mais malheureusement, ça l’a rendu totalement inutilisable. Je suppose que la finesse des soudures et des composants doit interférer quelque part dans le processus.

J’arrive certes à réduire des choses, mais je n’ai eu pour le moment aucun succès pour en agrandir. Je crois que je vais devoir me confectionner un atelier de résonance mobile miniature, et retourner à la carrière dans laquelle j’ai trouvé ces Euclidithes, pour expérimenter avec d’autres de ces pierres. Néanmoins, ça ne sera pas une tâche facile, puisque je ne peux apparemment pas réduire mes appareils de mesure. Néanmoins, si la voiture télécommandée m’a prouvé une chose, c’est qu’elle a de la force. Je suis en ce moment en train de lui imprimer une remorque, ce qui me permettra de prendre des vivres et le minimum du matériel d’analyses requis pour mes expériences. Je lui ai improvisé un toit en panneau solaire, relié à un chargeur de piles. Je pense qu’avec une charge, je pourrai quitter la ville cette nuit (car je ne m’y risquerai pas au grand jour), puis laisser mon destrier prendre un bain de soleil sur le bord de la route, un minimum caché du grand public, avant de foncer à la carrière. J’imagine que cela pourrait fonctionner, et que je pourrai vivre au moins une semaine on the road, vu que mon appétit a proportionnellement rétréci avec moi. Je n’ai plus qu’à attendre la fin de cette impression pour finir les préparatifs de ce road trip miniature.

J’ai toujours eu peur de l’inconnu, de l’extérieur. Je commence à appréhender. J’ai peur que quelque chose d’inattendu se produise, au delà de mon voyage en lui-même. Mais dans tous les cas,
il faut y aller.

Je dois y aller.

Un scientimage un peu perdu

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