La pale lueur de la lune offrait à deux éclaireurs la sécurité de la nuit. Leurs pas experts filaient à travers la forêt. L’objectif était clair. Une personne de leur clan avait été repérée dans un bâtiment. L’exfiltration s’annonçait pour autant complexe, les renseignements indiquaient une grossesse avancée qui allait potentiellement entraver la liberté de mouvement une fois la cible atteinte.
« t’es sûr de ce qu’on fait ? S’enquit l’un des rangers
-t’as déjà vu un taff sûr toi ? Se moqua l’autre
-oui bon OK, mais on sait pourquoi on veut l’exfiltrer elle ?
-parce qu’on a des informations fraiches et fiables, c’est pas suffisant ?
-je sais pas des infos fraiches et fiables on a plein pourquoi cette piste ?
-Bah va savoir moi j’ai juste vu l’occasion de me dégourdir les jambes en bas de nos montagnes, les grottes c’est bien, mais on s’en lasse vite »
Approchant d’un bord de falaise les deux rangers se turent. La petite ville était en vue en contrebas. Une ville apparemment récente en bord de montagne. Le genre de choses qui déplaît toujours aux habitants de ces dernières
« foutus habitants du plateau. Toujours a prendre ce qui leur appartient pas. Siffla l’un des deux »
l’autre la mine pas plus joyeuse lança une corde, préparant la descente en rappel.
« encore une magnifique idée qu’on a eu la. Comment on remonte avec une femme enceinte ?
-on profite des raccourcis quand on peut hein la randonnée nocturne sera moins drôle. »
Les deux éclaireurs s’approchait de l’enceinte de la zone. Les torches devenant une sérieuse complication a leur usage de la nuit. Restant a l’orée des bois ils inspectaient cette fâcheuse barricade pour une quelconque sortie d’urgence. Malheureusement cette dernière était tout aussi récente que le reste. Presque un avantage, tellement de bonne qualité que personne ne semblait y faire de rondes.
Le plus audacieux des deux rangers s’avança capuche retiré vers le garde a l’entrée. Son audace assurée par son collègue longeant le bord de la barricade.
« ho là mon brave. Y a-t-il moyen d’obtenir gîte ici cette nuit ? Racola l’éclaireur
-au milieu de la nuit ? Mais vous êtes pas bien ?
-les gibiers sont plus calmes la nuit tout comme nous, ça aide a les attraper
-maudit chasseurs toujours a se perdre sans considé… »
Le garde ne finit pas sa phrase, maîtrisé par le deuxième
« ils apprendront jamais. S’amusa l’éclaireur qui venait de jouer la comédie.
-jamais. J’ai pas la moindre idée de pourquoi Estalia s’entête a maintenir ses pires éléments a ses frontières. Mais ça fait nos affaires. Tiens hop une petite bourse au cas où. »
Le duo s’avança dans la grand-rue d’un air nonchalant comme si de rien était alors qu’il venait de cacher un corps assommé. Évidemment il ne s’agissait que de faux semblant tandis que la tension montait dans leur esprit à mesure qu’il s’approchait du bâtiment fourni par l’indic.
Approchant de la bâtisse ils comprirent le problème bien vite. C’était la seule en pierre dans la zone.
« tu penses à ce que je pense ?
-oui et t’es complètement fou de croire que ça serait une bonne idée
-oh allez un petit feu de joie et personne ne fera attention à nous.
-et comme ça Estalia aura de solides raisons de renforcer la garde ici. C’est non. Ce silex reste dans ta poche.
-rabat joie »
Les deux compères repartirent pour une inspection, après la barricade la bâtisse. Aucun d’eux ne perçut un quelconque danger. Pour autant aucun d’eux ne vit de choses faciles à exploiter. Tout au mieux une fenêtre. Au deuxième étage. Sans rien savoir de ce qu’il y aurait de l’autre côté. C’était toujours mieux que la porte principale.
L’un d’eux lancé par courte échelle escalada ce qu’il put. Fort heureusement le ciment du mur semblait extrêmement mauvais, exactement le genre qu’on met à la va-vite et cela permettait de gratter de petits interstices. Fastidieux et précaires mais en l’absence de mieux il faudrait s’en contenter. Après tout les pitons servirait à ça
Après un effort le grimpeur put atteindre la fenêtre.
Son acolyte en bas fut soudainement traversé d’une terrible pensée. Les gens du plateau haïssent la pierre. Pourquoi un tel bâtiment chez ces fanatiques de la boiserie ? Toucher la pierre est supposé être un sacrilège. Combien de prisonniers avait-il fallu ? Et pour quel usage ? Pris dans ses pensées il prit la corde de son collègue sur le coin de la tête. Celui-ci ne lui dit rien pour rester discret mais son visage suffisait a comprendre la moquerie. Arrivé en haut le pensif chuchota
« pourquoi des pierres ?
-et pourquoi pas. Répondit son comparse
-parce qu’ils sont supposés détester ça triple buse. Siffla le pensif
-tu marques un point j’oublie toujours que les types du plateau perçoivent la roche comme une malédiction. Tu crois que c’est une prison ?
-quoi d’autre. Il mettrait pas des hauts dignitaires dans un lieu infamant.
-Oh merde. Mais qui laisse les fenêtres ouvertes dans une prison ?
-probablement le genre de gars laissé là parce qu’il est trop mauvais pour faire la guerre. J’entends des pas! »
le duo se réfugia loin de la porte, accroupi derrière le bureau mains sur les hanches, prêts à dégainer les couteaux de lancer qui s’y trouve, les bruits continuèrent cependant au-delà de la porte. Rassuré le duo se rapprocha à nouveau de la porte tentant cette fois de l’ouvrir pour découvrir qu’elle était verrouillée
« voila qui explique la fenêtre ouverte. Maugréa l’un d’eux »
Coincés dans leur progression ils décidèrent de se poser confortablement dans la pièce en attendant un passage quelconque. Après quelque temps la serrure cliqueta et un jeune garçon entra mal habillé et visiblement fatigué. Depuis leur cachette les deux éclaireurs observait ce dernier puis par signe se mirent d’accord. Le plus proche de la porte s’y glissa et la referma silencieusement, tandis que l’autre fondit sur le garçon pour le maîtriser.
« bonjour jeune homme. Fit l’éclaireur un couteau en main. Je serais toi je répondrais aux questions sans crier, c’est la meilleure chose à faire pour qu’il ne t’arrive rien de mal. »
le gamin était visiblement sous le choc. Probablement pas en état de répondre a quoi que ce soit dans cet état.
« eh du calme on ne te veut rien de mal. Tant que tu ne cherches pas a nous nuire évidemment. S’adressa l’autre au garçon Pose le sur la chaise. Fit il a son collègue »
le garçon installé sur la chaise était toujours en panique malgré tout et rien ne semblait pouvoir l’apaiser dans une telle situation. Le plus bourrin des deux éclaireurs, agacé, tenta de l’assommer avec un résultat incertain
« ah bah c’est malin ca. Signifia son collègue. Toujours dans la finesse avec toi
-je suis venu pour me dégourdir les jambes pas faire baby-sitter. Rétorqua le bourrin
-génial. Bon allez viens la porte est ouverte monsieur jambe lourde. »
Les deux acolytes progressèrent dans le bâtiment. Non sans avoir enfermé l’enfant dans le bureau. Le plus prudent des deux ouvrait la marche incertaine des velléités de son collègue. Les deux sur le qui vive longeait la grande terrasse intérieur qui servait de couloir supérieur au bâtiment.
Le plus aventureux des deux passa la tête au-dessus des barreaux pour observer le rez-de-chaussée juste en dessous. Il y vit une porte ouverte. Rattrapant son collègue, il pointa la porte ouverte du doigt recevant un acquiescement de celui-ci par signe. Avisant les environs ils finirent par repérer un moyen de descendre
« mais où est ce con de gamin ? Pas foutu de me rapporter un sachet. Se fit entendre dans la pièce a la porte ouverte »
L’odeur du sang était prégnante. À ce ressenti les éclaireurs se raidirent, leurs doigts plus proches de leurs couteaux. Collé contre le mur à l’extérieur de la pièce le plus prudent chuchota
« trop tard ?
-j’en sais rien faut vérifier. Lâcha l’autre aussi doucement avant de perdre toute discrétion en se calant dans l’encadrement de la porte »
La salle était exiguë, méritant parfaitement son nom de cellule. Les murs et le sol évidemment couverts de boiseries. Tout comme le lit, maculé de sang. Au sein de celui-ci une femme a l’état de conscience incertain et un bébé fort silencieux au vu des circonstances. A coté un homme habillé tel les notables de la ville, le visage crispé. Le sang de l’éclaireur aventureux ne fit qu’un tour. Il dégaina son couteau et le projeta sur l’homme. Celui-ci la peau parcourue d’un flash bleuté dégaina à une vitesse irréelle pour stopper la course du projectile, qui sur un flash cette fois rougeâtre le fit de son plein gré avant de reprendre sa course une fois l’épée prise dans son inertie pour aller se loger dans l’œil de celui qui semblait dignitaire du régime en place.
Le plus prudent observa son collègue se jeter sur son arme et paniqua en le voyant en faire usage sans la moindre hésitation. Il s’avança lui aussi dans l’encadrement de la fatidique porte pour observer les dégats. Un homme, visiblement important réduit a l’état de cadavre à proximité du lit d’une femme évanouie et de son bébé.
« mais t’es vraiment pas fin toi hein ? Lança-t-il
-eh ce mec était compétent dans la manipulation d’énergie interne j’ai vu le flash partir. Tu sais très bien ce qu’on dit sur ce genre de type. Le corps à corps signifie la mort. Se défendit le plus aventureux.
-je… OK passons »
le plus prudent s’avança vers le lit pour vérifier l’état de la dame. Malheureusement au vu de son pouls celle-ci semblait être plus qu’évanoui. D’un rapide geste il fit part de la funeste nouvelle a son collègue. Ce dernier s’avança alors dans la salle et empoigna le gosse.
« bah qu’est-ce tu fous ? Le regarda le plus prudent d’un air confus
-un gosse dans une prison de pierre ? Alors que ces types s’imaginent damnés a jamais au contact de la roche ? On peut pas le laisser là il serait laissé à mourir de faim. Enfin quand même c’est ton truc ce genre de chose non ? Ou ptet juste que je réfléchis trop avec mon ventre. Allez on se casse. Répliqua le plus aventureux »
sur le chemin du retour ils croisèrent de nouveau le gosse, pleinement conscient, dans la pièce a la fenêtre ouverte.
« je viens avec vous. Lâcha ce dernier
-mais que ? Pardon ? Comment tu ? Rétorqua le plus prudent
-j’ai pas ce truc moi, vous savez la peau bleue, je sais pas faire ça et apparemment dans les montagnes y a des refuges à peaux ternes je veux aller là-bas. Tenta le gosse rassemblant le peu d’assurance que lui autorisait la situation. »
Le ranger aventureux éclata de rire.
« alors comme ça on est une peau terne ? Fit-il moqueur. Eh bah allez on t’embarque fiston, je savais pas que je tapais la famille je m’excuse. Non mais t’imagine ? je pensais faire une promenade me vla à jouer la garderie. Non mais eh regarde-moi ? Un gosse dans le dos et un autre à surveiller ? »
Le ranger aventureux explosa de rire à nouveau tandis que son collègue vérifiait les piolets. Satisfait il entreprit la descente laissant son collègue s’esclaffer a l’étage. Puis il attendit le paquet, ça ne rata pas, le jeune garçon, inexpérimenté, rata la prise et atterrit dans les bras du ranger. Tandis que le plus aventureux était toujours tout sourire en touchant le sol non sans avoir retiré les piolets, il allait quand même pas perdre son matos.
Il fut décidé que le jeune garçon, connu de la zone passerait en dernier pour esquiver les soupçons. Le plus prudent des deux éclaireurs préféra passer par des ruelles adjacentes suivi de ce fait par le reste de la troupe voyant que l’heure avancée de la nuit n’offrirait aucun anonymat dans la grand-rue ou il était déjà passé.
Après ce dernier périple le groupe désormais grossi se retrouva à la corde qui avait permis tout ça.
« alors mon gaillard tu sais grimper ? S’amusa l’aventureux
-grimper ? A ça ? Bah non. Prit peur le jeune gamin
-et bah soit t’apprend vite soit tu redeviens une peau terne. C’est toi qui vois, allez je te montre tu vas voir c’est pas dur. Le taquina l’aventureux »
Faisant un geste il invita le plus prudent à attendre en haut de la corde, tandis que son collègue grimpait, l’aventureux décrivait au gamin pourquoi ces gestes existait et comment les reproduire au mieux. Enfin il aida le gosse avec la plus grande courte échelle qu’il put. Après quelques secondes, le gamin tétanisa dessus.
« eh tétanisez c’est déjà rester dessus c’est un bon début. S’amusa le plus aventureux
-oh le pauvre, bon allez changement de plan je redescends. Rabroua le plus prudent redescendant et remontant la corde cette fois avec le gosse en paquetage
-oh mais quelle idée j’ai eu, mais tout plutôt que ce type atroce et ses corvées de nettoyage. Marmonna le dit gosse
-ah merde j’ai les bras en feu. Dépêche la nourrice, j’ai soif. Lança le plus prudent a son collègue
-eh c’est pas mon problème si tu sèches l’entrainement. On est pas des internes on peut pas tricher nous. S’amusa le plus aventureux.
-des internes ? Demanda le gosse
-oui l’inverse des peaux ternes tu sais les types qui peuvent illuminer leurs peaux quoi. Expliqua le plus prudent en attendant son collègue
-ah les gens normaux quoi ? Regarda le gosse intrigué
-gamin, ces gens la sont pas normaux tu t’en rendras bien vite compte. Rétorqua l’éclaireur prudent en s’accroupissant pour le regarder dans les yeux afin d’appuyer le message. Ces gens-là, les internes nous ont collé dans les montagnes y a des siècles pour rester entre eux terrifié par les externes. Ou comme tu le dis, les peaux ternes. Expliqua l’éclaireur
-terrifié ? Mais de quoi ? S’intrigua le gosse, une lueur dans les yeux
-de nous, et de nos pouvoirs. Fit le ranger faisant virevolter un de ces couteaux autour de lui en illustration, voila le vrai pouvoir des peaux ternes
-bon allez ça suffit les cours d’histoire, j’ai faim et j’ai cru comprendre que t’avais soif ? Donc prends-moi ce gosse sur tes épaules et on tape notre meilleur course jusqu’au camp. Lâcha le plus aventureux qui avait atteint le haut de la corde.
-c’est censé être une course équitable que le moins musclé porte le gosse le plus lourd ? Taquina le plus prudent
-OK monsieur le comité des sports, voila ton paquetage. Offrit le plus aventureux
-oh merci votre grâce s’amusa le plus prudent calant le gosse, Allez 3 2 1. »